Introduction
Le projet de loi de finances 2025 actuellement débattu à Madagascar prévoit l’introduction d’une taxe de 0,5 % sur les transactions de mobile money dépassant 150 000 ariary. Présentée par Rindra Rabarinirinarison, la ministre de l’Économie et des Finances, comme un « moindre mal » par rapport à d’autres options de taxation, cette mesure a suscité une vive opposition, notamment parmi les opérateurs de mobile money. Alors que le mobile money connaît un essor fulgurant à Madagascar, cette initiative pourrait compromettre les avancées en matière d’inclusion financière et de digitalisation économique.
Un Boom du Mobile Money à Madagascar
Avec 342 millions de transactions pour une valeur totale de 38 161 milliards d’ariary, le mobile money est devenu un outil essentiel pour l’accès aux services financiers, en particulier pour les populations non bancarisées. En effet, le mobile money joue un rôle crucial dans la facilitation des transactions quotidiennes et l’accès à des services financiers de base. Cependant, l’annonce de la taxe sur les transactions de mobile money pourrait freiner cet élan et compromettre les progrès réalisés en matière d’inclusion financière.
Les Risques d’une Chute des Transactions
L’expérience d’autres pays africains ayant introduit des taxes sur le mobile money est préoccupante. Au Ghana, par exemple, l’instauration d’une taxe électronique de 1,5 % en mai 2022 a entraîné une baisse significative de l’utilisation des services de mobile money. De même, au Kenya, une taxe de 10 % sur les frais de transfert d’argent a conduit à la croissance la plus lente du mobile money depuis son introduction en 2007. En Tanzanie, la taxation du mobile money a provoqué une chute de 38 % du volume des transactions dans les mois suivant sa mise en œuvre. Ces exemples montrent que la taxation peut avoir un effet dissuasif sur les utilisateurs, ce qui pourrait également se produire à Madagascar.
Une Menace pour la Survie Économique des Malgaches
La taxe proposée risque d’avoir un impact disproportionné sur les ménages les plus vulnérables, pour qui le mobile money est souvent le seul moyen d’accéder à des services financiers. Madagascar compte plus de 160 000 agents de distribution de mobile money, et une diminution de l’utilisation de ces services pourrait mettre en péril leur stabilité économique et celle de leurs familles. Les trois principaux opérateurs de mobile money à Madagascar – MVola, Orange Money et Airtel Money – ont exprimé leurs préoccupations, soulignant que cette mesure augmentera les frais de transfert et réduira l’accessibilité pour des millions de Malgaches.
Un Mécontentement Grandissant
Sur les réseaux sociaux, de nombreux Malgaches dénoncent le projet de taxe, le qualifiant d’injuste et inapproprié. Des membres de la société civile envisagent des actions pour contester cette décision, qui semble déconnectée des réalités économiques des Malgaches. Ce mécontentement pourrait alimenter une mobilisation plus large dans les semaines à venir, ce qui irait à l’encontre des objectifs affichés par le gouvernement en matière de digitalisation de l’économie.
Des Recettes Fiscales Souvent Surestimées
Le gouvernement malgache espère collecter 143 milliards d’ariary en 2025 grâce à cette taxe. Cependant, les précédents sur le continent africain montrent que les prévisions fiscales sont souvent surestimées. Au Ghana, les recettes générées par la taxe sur les transactions électroniques ont été bien en dessous des attentes initiales. Une approche plus constructive consisterait à soutenir le développement du mobile money plutôt que de le taxer, car encourager l’adoption des paiements numériques pourrait stimuler l’économie locale et renforcer l’inclusion financière.
Conclusion
La proposition de taxe sur les transactions de mobile money à Madagascar soulève des inquiétudes quant à ses conséquences sur l’inclusion financière et la stabilité économique des ménages vulnérables. Les expériences d’autres pays africains montrent que de telles mesures peuvent avoir des effets dissuasifs sur l’utilisation des services de mobile money, compromettant ainsi les avancées réalisées dans ce domaine. Face à ces enjeux, il est crucial que le gouvernement malgache reconsidère cette initiative et explore des alternatives qui favorisent le développement économique et l’inclusion financière.