Introduction
La Jirama, entreprise nationale d’électricité et d’eau à Madagascar, est souvent perçue comme le reflet de la gestion et de la gouvernance du pays. Son niveau de performance est intimement lié à la capacité des dirigeants à anticiper et à répondre aux besoins croissants de la population. Cependant, la réalité actuelle met en lumière les limites des opérations de cette entreprise, exacerbées par des choix politiques discutables et une gestion souvent chaotique.
Les Limites de la Gestion Actuelle
La récente intervention télévisée du Président Andry Rajoelina n’a convaincu que lui-même et ses partisans. Les promesses répétées de solutions à venir, souvent accompagnées de la recherche de boucs émissaires, ne font qu’alimenter le scepticisme général. La gestion de la Jirama est symptomatique d’une incompétence partagée par plusieurs dirigeants depuis la Deuxième République. En effet, l’absence d’anticipation des besoins en électricité pour accompagner la croissance démographique est un constat amer. Didier Ratsiraka, malgré ses défauts, avait eu la clairvoyance de prévoir les besoins futurs en électricité, ce qui a permis la mise en service de la centrale d’Andekaleka en 1982. Aujourd’hui, cette centrale, bien que vétuste, continue de fonctionner, mais peine à répondre aux attentes croissantes de la population.
Les Initiatives Oubliées
Il est important de reconnaître que certains efforts ont été faits, notamment sous la présidence de Hery Rajaonarimampianina, qui a lancé le projet de parc solaire à Ambatolampy et préparé des projets de centrales hydroélectriques. Malheureusement, ces initiatives ont été mises de côté par le gouvernement actuel, laissant la Jirama dans une situation précaire. Les dirigeants successifs, y compris Rajoelina, Ravalomanana et Zafy, ont échoué à appliquer le principe fondamental de la gouvernance : « gouverner, c’est prévoir ». Ce manque de vision a conduit à une aggravation du décalage entre les besoins en électricité et l’offre disponible.
La Crise de 2009 : Un Tournant Décisif
La crise politique de 2009 a été un tournant pour la Jirama. Les sanctions internationales qui ont suivi le coup d’État ont gravement entravé la capacité de l’entreprise à effectuer les maintenances nécessaires. Ce contexte soulève une question cruciale : peut-on considérer Andry Rajoelina et son coup d’État comme les principaux responsables de la dégradation de la Jirama ? La réponse semble évidente, tant les conséquences de cette période ont été désastreuses pour l’entreprise.
Une Gestion Financière Défaillante
À la fin de l’année 2008, la trésorerie de la Jirama était excédentaire, ce qui aurait permis une gestion plus efficace. Cependant, l’absence de vision, le manque de compétences et la corruption qui se sont intensifiés depuis 2009 ont creusé la tombe de la Jirama. Le choix de privilégier les centrales thermiques, malgré le potentiel hydroélectrique du pays, illustre parfaitement cette défaillance. Les infrastructures thermiques, bien que rapidement mises en place, engendrent des coûts exorbitants en carburant, alimentant ainsi un cercle vicieux de dépenses publiques.
Les Promesses Non Tenues
Les discours d’Andry Rajoelina, promettant des solutions durables et des investissements dans les énergies renouvelables, se sont souvent révélés être des promesses en l’air. En janvier 2012, il annonçait des projets ambitieux, mais douze ans plus tard, peu de progrès tangibles ont été réalisés. La situation actuelle de la Jirama, marquée par des coupures fréquentes et des factures en constante augmentation, témoigne de l’inefficacité des mesures prises.
Répression et Manque de Réaction Populaire
Malgré la gravité de la situation, la grogne populaire ne s’est pas encore transformée en un mouvement de contestation massif. L’absence d’une opposition politique crédible et la brutalité des forces de l’ordre pour réprimer les voix dissidentes contribuent à maintenir un statu quo précaire. La répression de la liberté d’expression est devenue la seule réponse d’un gouvernement incapable de résoudre les problèmes de la Jirama.
Conclusion
La Jirama est bien plus qu’une simple entreprise de services publics ; elle est le miroir des défaillances de la gouvernance à Madagascar. Les choix politiques, l’absence de vision et la corruption ont conduit à une situation où les besoins fondamentaux de la population ne sont pas satisfaits. Pour que la Jirama puisse retrouver sa place et répondre aux attentes des citoyens, il est impératif que les dirigeants prennent conscience de leurs responsabilités et agissent avec compétence et intégrité. La route vers une gestion efficace de l’électricité à Madagascar est semée d’embûches, mais elle est essentielle pour l’avenir du pays.