La technologie devrait transformer la gouvernance à Madagascar
Publié le 10 février 2025 dans ISS aujourd’hui
Par Peter Johnsonfuturologue, entrepreneur, ancien diplomate américain, fondateur et dirigeant de la Fondation Ayadee
Madagascar, souvent perçu comme l’un des pays les plus pauvres d’Afrique, possède un potentiel inexploité pour devenir un modèle d’innovation technologique sur le continent. En effet, la transition numérique pourrait révolutionner la formation des fonctionnaires et la gestion des structures de gouvernance, transformant ainsi le paysage administratif du pays.
Un projet ambitieux : PRODIGY
En 2020, Madagascar a lancé le projet PRODIGY, en collaboration avec la Banque mondiale, visant à moderniser les infrastructures numériques et à améliorer la gestion de l’identité. Ce projet représente une étape cruciale dans la transformation de l’administration publique malgache. Cependant, le pays fait face à des défis significatifs, notamment des barrières linguistiques, des infrastructures limitées et un accès restreint à l’électricité, qui compliquent la mise en œuvre de ces réformes.
Les défis de la gouvernance
Madagascar est un pays riche en diversité linguistique, avec 12 dialectes différents. Seulement 20 % de la population parle couramment le français, la langue officielle des institutions gouvernementales. Cette situation crée des obstacles à la communication et à la formation des fonctionnaires. De plus, seulement 33 % de la population a accès à l’électricité, et ce chiffre tombe à 15 % dans les zones rurales. Ces défis rendent la transition numérique d’autant plus complexe.
Un terrain d’essai prometteur
Malgré ces obstacles, Madagascar bénéficie d’un système de gouvernance centralisé et de partenariats internationaux qui en font un terrain d’essai idéal pour les initiatives d’e-gouvernance. En 2024, des engagements auprès des chefs de gouvernement ont mis en lumière les défis et les opportunités qui font de Madagascar un cas d’étude fascinant.
Innovations locales et finance numérique
Les solutions de paiement par téléphonie mobile et les initiatives de gouvernance numérique témoignent d’un intérêt croissant pour la transformation numérique. Madagascar compte plus d’utilisateurs de paiement par mobile que de détenteurs de comptes bancaires, ce qui montre une adoption rapide des technologies financières. Le projet PRODIGY encourage également l’émergence de nouvelles entreprises et de paiements numériques.
Vers une gouvernance numérique
Des initiatives telles que la Digital Governance Unit et le projet X-Road, en collaboration avec l’Estonian e-Governance Academy, favorisent l’e-gouvernance en améliorant la sécurité des échanges de données et la transparence. L’accès à Internet, qui est passé de 5 % en 2016 à 22 % en 2021, est un facteur clé de cette transformation.
Un avenir prometteur
Dans les deux prochaines décennies, Madagascar pourrait connaître des changements sociétaux profonds grâce à ces avancées technologiques. Des évaluations récentes soulignent les progrès du gouvernement malgache en matière de maturité numérique, préparant le terrain pour une nouvelle génération de services publics basés sur Internet.
Connectivité et intelligence artificielle
D’ici 2044, des technologies telles que l’Internet par satellite et les réseaux 6G pourraient offrir une connectivité à haut débit, même dans les zones les plus reculées. L’intelligence artificielle pourrait également jouer un rôle crucial en éliminant les barrières linguistiques grâce à des traductions en temps réel.
Énergies renouvelables et infrastructures
L’avenir de Madagascar pourrait également être marqué par des solutions en matière d’énergies renouvelables, telles que les technologies solaires et éoliennes, qui résoudraient le problème d’électricité dans les zones rurales. Cela faciliterait l’adoption des technologies numériques et renforcerait la gouvernance.
Un modèle de gouvernance décentralisée
L’Évaluation de l’économie numérique de la Banque mondiale a identifié des domaines stratégiques pour la mise en place d’un modèle de gouvernance décentralisé, notamment la construction d’infrastructures numériques et le développement d’une main-d’œuvre qualifiée. Dans vingt ans, l’analyse politique assistée par l’IA pourrait fournir des informations en temps réel aux décideurs.
Participation citoyenne et gouvernance numérique
Le Forum national de Madagascar sur la gouvernance de l’Internet, lancé en 2019, a permis aux citoyens d’influencer les politiques numériques. On peut envisager un avenir où les réunions municipales en ligne et les guichets de services publics en réalité augmentée deviendront courants.
Révolution de la formation des fonctionnaires
La formation des fonctionnaires pourrait également être transformée grâce à des parcours d’apprentissage personnalisés pilotés par l’IA et des simulations en réalité virtuelle. Cela garantirait un développement continu des compétences et une meilleure gestion des crises.
Madagascar comme centre d’innovation
Dans cet avenir optimiste, Madagascar pourrait devenir un centre d’innovation en matière de service public pour l’Afrique. Un réseau panafricain d’apprentissage entre pairs pourrait faciliter le partage des connaissances et des meilleures pratiques.
Les défis à surmonter
Cependant, le chemin vers cette transformation sera semé d’embûches. Madagascar aura besoin d’infrastructures numériques étendues, d’une éducation améliorée et de partenariats solides. Bien que ce scénario soit ambitieux, il démontre ce qu’une vision claire et une planification systématique peuvent accomplir.
Conclusion
La vision pour Madagascar présentée ici est un scénario optimiste qui dépend de la capacité à surmonter les obstacles tels que le manque de financement et le faible niveau d’habileté numérique. Malgré les difficultés, la poursuite de cet objectif pourrait engendrer des progrès significatifs. Le succès de Madagascar pourrait prouver que la vision, l’engagement et la technologie peuvent relever les défis les plus ardus, faisant du pays un modèle pour d’autres nations africaines.
